
Le Trophée Marie-Agnés Péron 2018 – Première course terminée…
Récit du Trophée Marie-Agnès Péron 2018
Ce week-end se tenait l’édition 2018 du Trophée MAP (Marie-Agnès Péron, en hommage à la Ministe disparue en mer durant la Mini-Transat de 1991).
Cette course en solitaire a beau être la plus courte du circuit, elle n’est pas forcément la plus facile. En effet, le parcours nous impose de faire – grossièrement – le tour de l’île de Groix, puis celui de l’île de Sein, le tout au départ de Douarnenez.
Il faut donc passer à l’aller le raz de Sein, et au retour, l’occidentale de Sein, 2 passages dans lesquels les courants de marée sont très forts et peuvent lever une mer relativement affreuse.
Pour cette course, mon but premier est de finir et si possible, sans casse. Les avaries à répétition ont parsemés mes 2 premières courses et mes convoyages jusqu’à présent. Pour ça, chose réussie 🙂

En résumé, nous partons jeudi midi de Douarnenez. Le vent est d’Ouest et nous sortons donc au près – contre le vent – de la baie de Douarnenez, direction le raz de Sein. À cette allure, il faut que je progresse en réglage. La veille, j’ai passé 3h à régler les haubans et la mature, mais avec mon Mini qui est unique en son genre, il n’y a pas de manuel, que du tâtonnement. Même si je finis la sortie de baie en fin de flotte, je trouve qu’il y a déjà une amélioration par rapport à avant.

Puis direction le raz de Sein, les courants sont avec nous et nous portent vite vers le sud. Une fois là-bas, il est temps de foncer sur le sud de l’archipel des Glénans, la prochaine marque de passage. Envoi du Spi Max, 90 m2 de toile qui tractent le voilier à son plein potentiel. Au début, peu de vent, et plus les heures passent, plus ça monte. De 6 noeuds à 17h, la flotte se retrouve dans 18-20 noeuds vers minuit à l’approche des Glénan. Cette voile est du coup un peu sur-dimensionnée, je pars au tas 2 ou 3 fois (le bateau se couche dans les vagues sur le côté), mais rien de méchant. Je vois les feux de navigation des autres minis se rapprocher, et pour certains passer derrière moi. 🙂
Un petit coup de stress monte car je m’aperçois que je fonce à 11 nœuds dans un petit groupe de voiliers devant qui ont du affaler leur spi. Il fait nuit noire, et la nuit, les distances sont trompeuses… et mon AIS – une sorte de radar moderne – ne fonctionne pas.
J’affale donc le spi dans la précipitation, et dans ce vent, le bout qui tient le spi dans le nez du bateau file à toute allure et me brûle 2 doigts et la paume de la main. Où sont les gants ? Dans la poche… bêtise !
Durant ce bord de 6h, j’aurais bien refait mon retard, 7 bateaux doublés, et je suis à moins d’1 mille du gros du peloton. Mais la brûlure fait mal, et je reste 30 min la main dans l’eau froide pour faire passer la douleur. Il est minuit, et normalement je serais en train de renvoyer une voile intermédiaire (le gennaker) pour foncer jusqu’à Groix, et profiter de ces 2-3h pour dormir… mais à la place je souffle un peu, je désinfecte la plaie et panse la main. Je vais finalement faire une sieste d’une heure, tandis que le voilier avance à vitesse réduite.
À ce moment, je me recentre sur l’objectif: finir la course sans casse – mécanique ou humaine. Donc plus de prise de risque. Je connais de mieux en mieux les réactions du bateau, et de plus en plus je ressens son potentiel que je n’utilise pas complètement. Mais un bateau (ou un marin) cassé ne finit pas la course. Durant la nuit, nous faisons le tour de Groix dans un vent qui tombe. Le jour se lève et j’aperçois mon copain Thibaut sur le 891. Il a l’air d’avoir un souci, car alors même qu’il porte plus de toile que moi, je le double sans peine.

J’apprends son abandon 4h plus tard (courage pour la répa!). La nuit d’avant, il s’est pris un casier de pêche sous grand spi, et le bateau est parti se coucher dans les vagues, en pliant l’étai (le câble en avant du bateau). Il ne veut pas prendre le risque de démâter et se déroute vers Concarneau.
La journée du vendredi s’annonce longue: la mer est grosse (4-5m de houle par moment), et le vent faible. Durant toute la journée, nous tentons d’avancer vers l’Ouest pour revenir vers Sein. Le bateau cogne toutes les 30 secondes dans les grandes vagues, ça raisonne et ça fait mal. À ce moment, on se demande ce qu’on fait là… mais il faut continuer. Il y a une bascule de vent avantageuse prévue pour la fin d’après-midi, et je l’attends avec impatience. Malheureusement, elle arrivera un peu plus tard et plus faiblement que prévue. Ma stratégie d’aller dans l’Ouest n’est pas gagnante du tout. Dans la nuit le vent revient, et je peux enfin me diriger vers l’Occidentale de Sein. Dernière grande marque de parcours, et retour à Douarnenez.
La fatigue m’atteint complètement le samedi matin, 40h sans vraiment dormir, et il ne me reste plus qu’à traverser la mer d’Iroise pour rentrer. Heureusement le vent monte et permet de rentrer en route directe.
Voilà, j’arrive donc vers 10h30 le samedi, après 44h30 de course. 16ème sur 18 dans ma catégorie, avec au final peu de retard sur le reste de la flotte. Content d’avoir fini en tout cas, les premiers milles sont validés pour se qualifier à la Mini-Transat 2019 !
220/1500 M en course !